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Automne 2025 (Volume 35, numéro 3)

La sarcoïdose pour nos rhumatologues : cas complexes et atypiques

Par Na’ama Avitzur, M.D., FRCPC; et Daniel Vis, M.D., FRCPC

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La sarcoïdose est une maladie granulomateuse systémique d'origine inconnue qui peut toucher presque tous les organes. En raison de la nature inflammatoire et multisystémique de la maladie, la sarcoïdose relève du domaine de la rhumatologie et doit être prise en compte dans le diagnostic différentiel d'une variété de manifestations.

MTC/sarcoïdose

Les maladies du tissu conjonctif (MTC) peuvent coexister avec la sarcoïdose. Les cliniciens doivent donc être vigilants lorsque les patients présentent des signes et symptômes nouveaux ou changeants qui ne peuvent être entièrement attribués à leur affection primaire. Dans ces cas, le diagnostic de MTC précède le plus souvent celui de sarcoïdose, mais l'inverse est également fréquent1. Les MTC les plus couramment diagnostiquées en association avec la sarcoïdose sont la sclérodermie, le lupus érythémateux disséminé et la polyarthrite rhumatoïde. Les patients sont plus souvent des femmes et présentent une sarcoïdose caractérisée par une atteinte cutanée ou pulmonaire1. Les patients sont plus souvent des femmes et présentent une sarcoïdose caractérisée par une atteinte cutanée ou pulmonaire1. Les facteurs possibles à l'origine de cette relation sont inconnus, mais l'hypothèse est que chez les personnes atteintes d'une MTC précédant la sarcoïdose, la MTC sous-jacente pourrait entraîner une inflammation granulomateuse conduisant à la sarcoïdose.

Sarcoïdose d'origine médicamenteuse

Les rhumatologues peuvent également être confrontés à des cas de sarcoïdose due à des réactions médicamenteuses. La sarcoïdose d'origine médicamenteuse a été rapportée comme étant causée par divers médicaments, notamment les interférons, les traitements antirétroviraux, les inhibiteurs de points de contrôle immunitaires et les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale (TNF). D'ailleurs, les inhibiteurs de points de contrôle immunitaires et les médicaments anti-TNF ont récemment fait l'objet d'un intérêt particulier2. Des séries de cas ou des rapports de cas ont été publiés décrivant une granulomatose de type sarcoïdique se développant chez des patients auxquels on avait prescrit, entre autres, de l'étanercept, de l'adalimumab et de l'infliximab3-5. Cette association semble contre-intuitive en raison de l'utilisation bien décrite du traitement anti-TNF pour la sarcoïdose réfractaire6. Les réactions peuvent toucher n'importe quel organe, entraînant une sarcoïdose pulmonaire, cutanée, rénale ou oculaire. L'arrêt du traitement anti-TNF responsable suffit généralement à résoudre la réaction, bien que le délai de rémission puisse varier de 1 à 12 mois7. Les glucocorticoïdes peuvent être utilisés pour traiter les patients présentant une dysfonction ou des symptômes importants au niveau des organes. Les tentatives de réintroduction d'un autre agent anti-TNF sont généralement bien tolérées, bien que des cas d'échec aient été rapportés8.

Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaires (IPCI) ont été associés à des réactions pulmonaires et cutanées de type sarcoïdose9. Ces médicaments comprennent le nivolumab, l'ipilimumab et le pembrolizumab, avec une incidence de réactions sarcoïdoseuses d'origine médicamenteuse comprise entre 2 % et 20 %10. Les recommandations thérapeutiques varient selon les directives cliniques, avec des recommandations de faible qualité préconisant la poursuite du traitement par IPCI dans les cas asymptomatiques, avec ajout de glucocorticoïdes à faible dose si les patients présentent des symptômes. Il est important de noter que toutes les directives recommandent de réaliser une biopsie des lésions suspectes afin de distinguer la sarcoïdose de la progression tumorale9.

On pense que le granulome sarcoïde se forme en raison d'une réponse immunitaire anormale à médiation cellulaire des lymphocytes T CD4+. Le déclencheur initial de cette réaction est la présentation d'un antigène non identifié par des cellules présentatrices d'antigènes, telles que les macrophages ou les cellules dendritiques, aux lymphocytes T11. Dans les cas réfractaires de sarcoïdose, les thérapies avancées cherchent à cibler directement ces voies.

Thérapies avancées

On pense que le granulome sarcoïde se forme en raison d'une réponse immunitaire anormale à médiation cellulaire des lymphocytes T CD4+. Le déclencheur initial de cette réaction est la présentation d'un antigène non identifié par des cellules présentatrices d'antigènes, telles que les macrophages ou les cellules dendritiques, aux lymphocytes T11. Dans les cas réfractaires de sarcoïdose, les thérapies avancées cherchent à cibler directement ces voies.

L'infliximab est un anticorps ciblant le TNF-alpha et constitue généralement l'agent de troisième intention privilégié chez les patients réfractaires. Les données issues d'essais cliniques ont montré des améliorations de la fonction pulmonaire, de la qualité de vie et du test de marche de six minutes11,12. Les patients présentant des signes persistants d'inflammation ou de maladie pulmonaire sont plus susceptibles de répondre favorablement au traitement13. L'adalimumab est un anticorps qui cible également le TNF-alpha. Certaines données suggèrent une amélioration de la sarcoïdose pulmonaire réfractaire grâce à l'adalimumab après l'échec de l'infliximab14. De plus, il s'est révélé bénéfique dans le traitement de l'uvéite, de la sarcoïdose cardiaque ou cutanée15-17. L'adalimumab est moins immunogène et présente moins de risques de réactions allergiques graves, mais l'infliximab tend à avoir un taux de réponse plus élevé11.

D'autres inhibiteurs du TNF sont considérés comme moins efficaces que l'infliximab et l'adalimumab, notamment le golimumab ou l'étanercept. Ces médicaments sont jugés inefficaces car leur action principale cible le TNF soluble plutôt que le TNF lié à la membrane11. De plus, l'étanercept semble être plus fortement associé au développement de réactions granulomateuses paradoxales de type sarcoïdose induites par les médicaments que les autres médicaments anti-TNF.

Il est intéressant de noter que, bien que la sarcoïdose soit une maladie principalement à médiation cellulaire T, un traitement ciblant les cellules B, tel que le rituximab, pourrait jouer un rôle dans les cas réfractaires. Une petite série de cas et un essai clinique ont montré des améliorations légères mais non durables de la capacité vitale forcée et du test de marche de six minutes18.

Le tocilizumab, un inhibiteur de l'IL-6, a démontré une amélioration des symptômes et de la fonction pulmonaire lorsqu'il est utilisé comme agent de quatrième ligne chez les patients réfractaires au traitement anti-TNF. Les patients de cette série de cas ont répondu au traitement malgré l'échec d'un ou plusieurs agents anti-TNF antérieurs, ce qui constitue un résultat prometteur pour une population réfractaire au traitement19. Le tofacitinib est un inhibiteur des kinases Janus (JAK), une petite molécule disponible par voie orale qui agit sur de nombreuses cytokines pro-inflammatoires impliquées dans la formation des granulomes sarcoïdes20. Diverses cytokines associées à la sarcoïdose transmettent des signaux via la voie de signalisation JAK-STAT. Par conséquent, les inhibiteurs des JAK constituent des traitements prometteurs qui pourraient s'avérer bénéfiques dans le traitement de la sarcoïdose. Le tofacitinib s'est révélé efficace pour améliorer la sarcoïdose cutanée et pulmonaire réfractaire dans une petite série de 10 cas21.

Conclusion

En résumé, la sarcoïdose est une maladie complexe que le rhumatologue peut rencontrer dans divers contextes cliniques. Le diagnostic de sarcoïdose d'origine médicamenteuse ou de sarcoïdose concomitante à une maladie auto-immune nécessite une grande vigilance clinique et une bonne connaissance de ces complications rares. Les options thérapeutiques pour les cas avancés se multiplient, offrant aux patients des options plus efficaces que celles qui existaient auparavant.

Na’ama Avitzur, M.D., FRCPC
Division de pneumologie, Département de médecine,
Université de la Colombie-Britannique,
Vancouver (Colombie-Britannique)

Daniel Vis, M.D., FRCPC
Division de pneumologie, Département de médecine,
Université de Calgary,
Calgar (Alberta)

Références :

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