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Été 2023 (Volume 33, numéro 2)

Grand débat 2023

Par Volodko Bakowsky, M.D., FRCPC, au nom de
Cory Baillie, M.D., FRCPC, Louis Bessette, M.D.,
M. Sc., FRCPC, Michelle Batthish, M.D., M. Sc., FRCPC et Anne MacLeod, PT, MPH, ACPAC

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Il est résolu que les Canadiennes et Canadiens nouvellement atteints d’arthrite inflammatoire doivent avoir accès à toutes les options thérapeutiques dès l’apparition de la maladie pour induire une rémission.

L’un des aspects les plus agréables de la réunion scientifique annuelle de la SRC qui s’est déroulée cette fois en direct a été de pouvoir partager la scène avec certains des plus grands experts en soins rhumatologiques au Canada dans le cadre du Grand Débat. Ces éminents intellectuels ont su présenter leurs arguments d’une manière si accessible que même le président (universellement reconnu comme n’ayant pas un grand esprit) a pu suivre le débat. Les fidèles de la SRC ont également vu le plus grand rhumatologue canadien (le Dr Bessette) et le deuxième plus grand rhumatologue canadien (le Dr Baillie) monter sur scène en même temps.

Le Dr Cory Baillie et Anne MacLeod sont intervenus en faveur de la motion. En l’absence de lignes directrices ou de preuves pour défendre sa position, la partie affirmative a dû s’appuyer sur des arguments illusoires et obscures. Parmi les piliers de leur argumentation initiale, une enquête menée auprès de 39 rhumatologues canadiens a révélé que
81 % d’entre eux préféreraient que leur rhumatologue leur prescrive une monothérapie ou une polythérapie biologique s’ils étaient eux-mêmes diagnostiqués avec une polyarthrite rhumatoïde modérée à sévère. Les orateurs de la partie affirmative ont également présenté des données sur la prévalence de l’intolérance au méthotrexate et à d’autres médicaments ARMM traditionnels (antirhumatismaux modificateurs de la maladie) chez les adultes et les enfants, sur l’efficacité des médicaments biologiques à réduire l’invalidité, sur les économies réalisées grâce aux biosimilaires et à la réduction progressive des médicaments biologiques, qui rendent le traitement biologique précoce plus abordable, et sur l’ampleur du gaspillage des pouvoirs publics qui banalise les coûts des médicaments biologiques pour les patients souffrant de maladies rhumatismales.

Les données canadiennes sur l’accès aux soins, tant en rhumatologie adulte qu’en rhumatologie pédiatrique, révèlent des problèmes systémiques pour atteindre les points de référence créés par l’Alliance sur les temps d’attente en 2014. La recherche confirme également que les temps d’attente dans certaines zones urbaines, comme Toronto, sont plus courts qu’ailleurs dans la province de l’Ontario. Des études récentes ont conclu à une tendance à l’amélioration de l’accès au diagnostic et au traitement précoce de la polyarthrite rhumatoïde au fil du temps. Toutefois, de nombreuses lacunes subsistent, notamment en ce qui concerne la distribution sous-optimale d’ARMM. En cette ère moderne d’options thérapeutiques avancées, nous avons encore des problèmes d’accès aux soins et d’utilisation opportune des médicaments. Ainsi, tous les Canadiens atteints d’une nouvelle arthrite inflammatoire devraient-ils avoir accès à toutes les options thérapeutiques dès l’apparition de la maladie? La réponse semble être un grand oui.

Les Drs Louis Bessette et Michelle Batthish se sont exprimés contre la motion et leur camp a évidemment avancé un grand nombre d’informations pour étayer leur argumentation. Selon eux, les preuves scientifiques actuelles ne soutiennent pas l’utilisation d’antirhumatismaux modificateurs de la maladie synthétiques ciblés/biologiques en tant que traitement de première intention dans l’arthrite inflammatoire précoce. Dans les études sur les traitements à objectif quantifié, les patients initialement traités par des antirhumatismaux modificateurs de la maladie synthétiques conventionnels présentent à long terme une activité clinique, une capacité fonctionnelle et une progression des lésions articulaires similaires à celles des groupes initialement traités par des ARMM synthétiques ciblés/biologiques. De plus, commencer par un produit biologique n’améliore pas les chances d’obtenir une rémission sans médicament et n’est pas une stratégie rentable. Selon les données de la cohorte canadienne sur l’arthrite précoce CATCH (Canadian Early ArthriTis CoHort), plus de 50 % des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde sont en rémission après un an d’utilisation de médicaments ARMM synthétiques conventionnels. En outre, 75 % des patients canadiens atteints de polyarthrite rhumatoïde qui ont commencé à prendre des ARMM synthétiques conventionnels en première intention n’ont pas besoin d’ARMM synthétiques ciblés/biologiques pour contrôler leur maladie au cours des cinq premières années de suivi. De même, dans le registre sur l’arthrite juvénile idiopathique (AJI) de la CAPRI (Canadian Alliance of Pediatric Rheumatology Investigators), 81 % des patients nouvellement diagnostiqués atteints d’AJI présentent une maladie cliniquement inactive et la plupart d’entre eux ne prennent que des ARMM synthétiques conventionnels.

La sécurité doit également être prise en compte dans cet argument. Une revue systématique a révélé que la probabilité de développer une infection grave sous traitement biologique était de 1,48 fois plus élevée à celle sous ARMM synthétiques conventionnels. En outre, il n’existe pas de lignes directrices publiées recommandant l’utilisation d’ARMM synthétiques ciblés/biologiques comme traitement de première intention pour les patients n’ayant jamais reçu d’ARMM synthétiques conventionnels. Les preuves scientifiques montrent qu’en commençant des ARMM synthétiques conventionnels avec une stratégie de traitements à objectif quantifié et en ajoutant des ARMM synthétiques ciblés/biologiques si nécessaire, le patient aurait les mêmes chances d’obtenir un contrôle de la maladie sans impact fonctionnel à long terme qu’en commençant par des ARMM synthétiques ciblés/biologiques.

Malheureusement, toutes les choses ont une fin (sauf les formulaires de demande de thérapie avancée), et il a été temps de voter. Le vainqueur a été déterminé par un applaudimètre à l’ancienne, le côté « contre » (les Drs Bessette et Batthish) a clairement été nommé vainqueur. Toutefois, compte tenu de la nature déséquilibrée des preuves (sans rien enlever à l’analyse statistique de Cory Baillie), l’équipe « pour » mérite elle aussi d’être saluée.

Parmi les arguments convaincants, des touches humoristiques ont été disséminées tout au long du débat, notamment la moquerie habituelle à l’égard de Carter Thorne. Le Grand Débat cherche à trouver le bon équilibre entre science et divertissement, et cette année les débatteurs ont frappé un grand coup.

Volodko Bakowsky, M.D., FRCPC
Directeur et chef de division intérimaire, professeur agrégé
Division de rhumatologie, Département de médecine
Université Dalhousie
Halifax (Nouvelle-Écosse)

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