Automne 2022 (Volume 32, numéro 3)
Rapport du congrès
de l'EULAR 2022
Par Philip A. Baer, MDCM, FRCPC, FACR
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Une autre année de pandémie, un autre congrès de l'EULAR
(European Alliance of Associations for Rheumatology) virtuel
pour moi. Cette fois-ci, la réunion était de nature hybride,
avec des séances en personne à Copenhague. J’ai été honoré que mon
résumé des résultats de l’étude ADAGIO (POS0288) sur les schémas
de désescalade du méthotrexate (MTX) chez les patients canadiens
initiant un traitement avancé de la polyarthrite rhumatoïde (PR) soit
accepté. Lorsque cette affiche a ensuite été sélectionnée pour une
tournée d’affiches, cela m’a semblé encore mieux. J’ai enregistré une
présentation de cinq minutes de l’étude et je l’ai téléchargée sur le
portail de l’EULAR sans aucune difficulté - enfin, il m’a fallu trois
prises pour faire entrer précisément tout ce que je voulais dire dans
le temps imparti, mais ce n’était pas inattendu. Le choc a été de découvrir
qu’on avait besoin de moi pour trois minutes de questions-réponses
en direct à 3 h 45, heure de Toronto. Heureusement, c’était
le samedi de la réunion, j’ai donc pu rattraper le sommeil perdu plus
tard dans la journée. Ayant participé virtuellement, il n’y a pas eu de
décalage horaire à combattre. La séance était assez intéressante et
comprenait un autre résumé sur l’arrêt du MTX chez des patients
semblables (POS0286), et j’ai pu répondre aux questions qui m’ont
été posées.
Il s’agissait du 75e anniversaire de la première rencontre de l’EULAR,
qui s’était également tenue à Copenhague, et qui a été célébrée
lors de la cérémonie d’ouverture ainsi que tout au long de la conférence,
avec une excellente séance mettant en évidence le passé, le
présent et l’avenir de l’EULAR. La plateforme de conférence présentait
une qualité audio et vidéo exceptionnelle, tant pour les séances
en direct que pour les séances préenregistrées. Certaines séances
n’ont pas été immédiatement disponibles pour les participants virtuels,
mais la plateforme est restée disponible jusqu’à la fin du mois
de juillet pour examen.
Parallèlement à la conférence, l'activité sur Twitter a été aussi
intense qu’à l’habitude, ainsi que des mises à jour quotidiennes de
l’équipe RheumNow dirigée par Jack Cush. J’ai particulièrement apprécié
les trois séances quotidiennes de synthèse d’une demi-heure
animées par Janet Pope et Hughes Allard-Chamard pour les rhumatologues
canadiens. Janet a publié mon Tweet préféré : « Je devais
aller à la séance sur la fatigue dans les maladies rhumatismales, mais
j’étais trop fatiguée! »
De nouvelles lignes directrices EULAR sur la gestion de la PR
et de la spondylarthrite axiale (AxSpA) ont été dévoilées. La ligne
directrice sur l’AxSpA, conjointement avec l’ASAS (évaluation de la
PR), a positionné l’Ankylosing Spondylitis Disease Activity Score (ASDAS)
comme principale mesure de l’activité quotidienne, a approuvé les
inhibiteurs des Janus kinases, ou inhibiteurs de JAK, comme traitement
de première ligne, et a donné la préférence aux inhibiteurs de
l’interleukine-17 (IL-17) chez les personnes présentant une atteinte
cutanée, et aux anticorps monoclonaux contre le facteur de nécrose
tumorale (TNF) chez les personnes présentant une uvéite.
Le groupe de travail sur les lignes directrices de la PR a bénéficié
de la contribution canadienne de Janet Pope. La recommandation
antérieure de l’EULAR d’utiliser des glucocorticoïdes à court terme en association avec des médicaments antirhumatismaux modificateurs
de la maladie (ARMM) synthétiques conventionnels a
été revue, car elle n’était pas en accord avec les directives actuelles
de l’American College of Rheumatology (ACR). La nouvelle terminologie
de l’EULAR indique que les glucocorticoïdes sont seulement
« à considérer » dans ce scénario et souligne qu’ils doivent
être interrompus aussi rapidement que possible. Le positionnement
des inhibiteurs de JAK, qui figuraient auparavant sur la même liste
que les produits biologiques, a été modifié à la lumière de l’essai
ORAL-Surveillance. Aujourd’hui, les inhibiteurs de JAK peuvent
être envisagés comme traitements avancés de première ligne, mais
il faut tenir compte des facteurs de risque pertinents en matière
d’événements indésirables cardiovasculaires majeurs (ÉICM), de
thromboembolie veineuse (TEV) et de malignité. Les données des
études en cours sur la sécurité du baricitinib, de RA-BRIDGE et de
RA-BRANCH, peuvent modifier cet avis lorsqu’elles seront publiées.
Une présentation intéressante sur l’incidence des lignes directrices
par le professeur L. Carmona a confirmé que l’adhésion aux
lignes directrices améliorait les résultats, mais a montré que cette
adhésion était faible, même dans les centres d’excellence en rhumatologie.
Les questions de genre dans les maladies rhumatismales ont été
mises en avant. La nécessité de réaliser davantage d’études a été
soulignée, ainsi que la disponibilité d’espaces sûrs et d’un soutien
adapté aux femmes. J’ai appris un nouveau sigle, DEIA, qui fait référence
à la diversité, à l’équité, à l’inclusion et à l’appartenance, autant
d’éléments importants à prendre en compte dans les soins aux
patients. L’étude OP0006 a été réalisée dans une optique de genre,
en examinant l’exposition à la silice comme facteur de risque de PR
chez les femmes, et en constatant que les activités de nettoyage, le
lavage de vêtements poussiéreux et la manipulation de talc étaient
les principales sources d’exposition.
Si l’on considère les résumés de manière plus générale, 619 couvraient
tous les aspects de la PR, 209 concernaient la COVID-19,
112 les maladies orphelines, 74 l’arthrose, 51 l’ostéoporose et 178
le traitement et les aspects cliniques de la polyarthrite psoriasique.
Les technologies futuristes comme l’apprentissage automatique, les
réseaux neuronaux et l’intelligence artificielle sont souvent évoquées.
La COVID longue et la PR difficile à traiter sont des sujets qui
m’intéressent également.
Parmi les autres articles qui ont attiré mon attention, citons
la fréquence de l’artérite temporale subclinique dans la pseudopolyarthrite
rhyzomélique (PPR) (OP0184), l’étude NORDSTAR sur
les différentes stratégies de traitement de la PR précoce (OP0058)
et deux études sur le maintien du MTX après l’immunisation contre
la COVID-19 (POS0259 et LB0003). J’ai également noté l’étude
POS0242 qui montre que les antipaludéens augmentent la rétention
des médicaments chez les patients sous produits biologiques et
inhibiteurs de JAK.
Les noms des études cliniques faciles à retenir étaient PAISLEY
(LB0004), une étude de phase 2 du deucravacitinib pour le lupus
érythémateux disséminé (LED), et GLORIA, une étude pragmatique
de la prednisolone à faible dose chez les patients atteints de PR âgés
de plus de 65 ans.
Dans l’ensemble, ce fut un autre excellent congrès annuel de
l'EULAR à tous les égards. L’année prochaine, la rencontre se tiendra
à Milan du 31 mai au 3 juin. La présence virtuelle sera-t-elle
toujours possible? Non, selon le plan actuel de l'EULAR.
Philip A. Baer, MDCM, FRCPC, FACR
Rédacteur en chef, JSCR, Scarborough (Ontario)
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