banner

Été 2021 (volume 31, numéro 2)

Prix du rhumatologue émérite de la SCR en 2021 :
Dre Rachel Shupak

Télécharger la version PDF

Pourquoi êtes-vous devenu rhumatologue? Quels sont les facteurs ou quelles sont les personnes qui vous ont inspiré à entreprendre cette carrière?
J’ai décidé de devenir rhumatologue dans ma deuxième année d’études, lorsque j’ai pris soin d’une jeune femme souffrant d’arthrite inflammatoire polyarticulaire aiguë et grave qui l’hypothéquait complètement. Sous la supervision des Dres Gladman et Lynn Russell, nous avons pu la traiter efficacement et elle est sortie de l’hôpital en marchant. La possibilité de traiter et de contrôler l’inflammation articulaire ou systémique tout en atténuant et en prévenant les dommages a fortement influencé ma décision. En tant que rhumatologue, je crois que nous améliorons la qualité de vie de nos patients.

Depuis 1995, vous êtes professeur agrégé à la faculté de médecine de l’Université de Toronto (UT). Au cours des 40 dernières années, vous avez formé et encadré beaucoup d’étudiants de premier cycle, de résidents de cycles supérieurs et de résidents en rhumatologie. Dans votre rôle d’éducatrice clinicienne, vous avez pu élaborer, mettre en oeuvre et évaluer des programmes éducatifs innovants pour les cliniciens en soins primaires, les patients et les professionnels paramédicaux.

(a) D’où croyez-vous que provient votre passion pour la formation?
J’ai compris en début de carrière l’importance de former les étudiants de premier cycle et de cycles supérieurs pour qu’ils sachent reconnaître, diagnostiquer et prendre en charge les patients atteints de maladies rhumatismales. Pendant mes cinq premières années à l’emploi de St Michael’s Hospital (SMH), j’ai dirigé une équipe de médecine interne générale pendant trois mois par an, ce qui m’a permis d’interagir périodiquement avec de nombreux étudiants et résidents. J’ai reçu des prix d’enseignement d’études supérieures et d’études de premier cycle, ce qui m’a aidé à comprendre que je faisais probablement du bon travail. Pendant de nombreuses années, j’ai renforcé mes compétences en formation et j’ai fini par cultiver la capacité à mettre sur pied des programmes éducatifs, ce qui m’a permis d’évoluer vers le rôle d’éducatrice clinicienne

(b) En tant qu’éducatrice clinicienne respectée, que conseillez-vous aux futurs rhumatologues?
Je leur dirais que pour bien faire son travail de rhumatologue, il faut d’abord bien faire son travail d’interniste. La rhumatologie s’intéresse aux maladies systémiques chez des patients souvent très malades et nécessitant un traitement et un suivi prolongé. Notre spécialité, qui est foncièrement pragmatique, repose sur un historique et un examen physique détaillés et complets. Les connaissances propres à cette spécialité évoluant rapidement, l’apprentissage continu fait partie intégrante de la formation et de la pratique clinique.

Si je suis devenue éducatrice clinicienne par la force des choses, pour exercer ce rôle en milieu universitaire de nos jours, il faut faire des études et obtenir une maîtrise. Les rhumatologues universitaires doivent enseigner, tandis que les éducateurs cliniciens ont pour rôle de créer des programmes innovants, de les évaluer et d’en publier les résultats.

Le programme de praticien clinicien avancé en soins pour l’arthrite (PCASA), que vous avez créé avec votre estimée collègue, la Dre Katie Lundon en est le clou. Ce programme universitaire et de résidence a permis d’établir un nouveau cadre de praticiens cliniciens afin de combler les lacunes actuelles et croissantes en matière d’accès aux soins pour les patients atteints d’arthrite et d’affections musculosquelettiques. Cent praticiens hautement qualifiés et compétents, diplômés de ce rigoureux programme, sont prêts à travailler dans un modèle de prestation de soins partagés. Pourquoi avez-vous créé ce programme et quel en a été l’effet sur le paysage rhumatologique canadien?
Conscients qu’il n’y aura jamais assez de rhumatologues pour assurer un accès équitable aux soins, Katie et moi espérions changer la façon dont les soins sont prodigués aux patients atteints d’arthrite et de maladies musculosquelettiques. Nous avons conçu un rigoureux programme d’études pour des professionnels de la santé fondé sur les compétences, que nous avons évalué prospectivement au auprès des étudiants du programme. Le manque de rhumatologues et leur répartition inégale au Canada, bien documentés, sont les principales causes du manque d’accès et de la piètre qualité de soins pour les patients atteints d’arthrite et d’affections musculosquelettiques. Notre objectif était d’éduquer (programme d’études) et de former (programme de résidence) des professionnels de la santé à travailler selon un modèle de soins partagés (maladies inflammatoires) ou de manière indépendante (ostéo-arthrite, spondylose), améliorant ainsi l’accès aux soins dans les centres ruraux ou éloignés, communautaires et urbains. L’année dernière, Amanda Steiman a gracieusement accepté de me succéder comme directrice médicale du programme de PCASA.

Parlez-nous de vos liens avec la Journée annuelle de l’arthrite pour les cliniciens de soins primaires, célébrant sa 14e année, dont l’objectif est de combler les lacunes de connaissances pertinentes des médecins généralistes et des PCASA au sujet des maladies musculosquelettiques.
J’ai lancé ce programme il y a une quinzaine d’années pour offrir une formation médicale continue aux médecins et praticiens de soins primaires. Bien que les patients atteints de maladies musculosquelettiques et d’arthrite représentent environ 15 % de tous les patients vus en soins primaires, il est bien connu que les connaissances et les compétences d’évaluation, de diagnostic et de prise en charge de ces pathologies doivent être améliorées chez les praticiens de soins primaires. Mon collègue, le Dr Ophir Vinik, qui assume le rôle de directeur médical de ce programme de perfectionnement professionnel continu (PPC) depuis environ cinq ans, continue à offrir un cours annuel de PPC exceptionnel.

Quel est le défi organisationnel et professionnel le plus important auquel vous avez été confronté, et comment êtes-vous parvenu à le surmonter?
Nous nous sommes lancés dans le fort ambitieux projet de PCASA, et nous étions déterminés à créer un programme rigoureux, offert de manière épisodique et fondé sur les compétences. Nous pouvions compter sur un important corps professoral (plus de 90), en grande partie bénévole, qui a permis la réussite du programme. Il a néanmoins été très compliqué, malgré nos efforts héroïques, de trouver un lieu et du financement durables pour le programme de PCASA. Nous faisions de bons progrès auprès du ministère de la Santé avant le changement de gouvernement, mais malheureusement la situation a depuis stagné. Le processus administratif se poursuit et, selon moi, portera ses fruits, en raison de la formidable valeur ajoutée que les diplômés du programme de PCASA apporteront à la prestation de soins aux patients.

Quels changements majeurs dans le paysage de la rhumatologie avez-vous observés au cours de votre carrière?
Nous avons tous vu une explosion des thérapies biologiques pour les maladies rhumatismales, dont profitent énormément nos patients.

Selon vous, quels seront les défis que les rhumatologues canadiens devront affronter dans l’avenir, et qu’est-ce que la SCR et eux peuvent faire pour les surmonter?
Je crois que nous devons rester axés sur le patient dans tout ce que nous faisons. Le défi consiste à fournir des soins équitables (nouveaux modèles de soins) et abordables (financés par la province). Nous devons redoubler d’efforts pour établir l’un des portefeuilles de prise en charge des maladies chroniques qui fournira les ressources nécessaires pour gérer efficacement les soins à nos patients. Le recrutement et le maintien en poste des rhumatologues sont des problèmes qui perdurent depuis que j’ai commencé à exercer. Cette priorité de la SCR doit le demeurer. Il faut toutefois favoriser la création de nouveaux modèles de soins, en mobilisant des professionnels paramédicaux bien informés, bien formés et hautement qualifiés, afin de combler les lacunes d’accès et améliorer la qualité de soins. Cela nécessiterait de nouveaux modèles provinciaux de financement et d’aiguillage et l’adoption des directives médicales récemment fournies aux infirmières praticiennes en Ontario. Le cancer et le diabète sont des exemples où cela peut fonctionner efficacement à la satisfaction des médecins, des professionnels paramédicaux et des patients.

Quel est votre livre préféré de tous les temps?
Je préfère la fiction historique, car elle me fait voyager dans différents lieux et époques. J’ai beaucoup aimé le roman Un gentleman à Moscou d’Amor Towles.

Si vos journées comptaient une heure de plus, comment l’utiliseriez-vous?
Je jardinerais.

Si vous ne deviez manger qu’un seul aliment jusqu’à la fin de vos jours, lequel serait-ce?
Du pain.

Chaque fois que vous entrez dans une pièce remplie de gens, quelle serait votre chanson thème?
« What the world needs now is love sweet love ». Il y a trop de colère et de haine dans le monde.

Combien de tasses de café vous faut-il pour avoir une journée productive?
J’en prends deux tasses au petit-déjeuner pour me réveiller et une à 16 heures pour m’aider à finir ma journée.

Dre Shupak recevant le prix du rhumatologue émérite de la SRC lors du gala virtuel en février.

Rachel Shupak, M.D., FRCPC
Professeure agrégée,
Département de médecine,
Université de Toronto
Médecin, Hôpital St. Michael’s
Toronto (Ontario)



Le code d'accès pour accéder à ce site est disponible à la page 4 du dernier numéro du Journal de la Société canadienne de rhumatologie (JSCR) ou dans la partie supérieure du plus récent courriel de diffusion de la version en ligne du JSCR que vous avez reçu. Les professionnels de la santé peuvent également obtenir le code d'accès en envoyant un courriel à l'adresse suivante : CRAJwebmaster@sta.ca.

Mémoriser