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Été 2017 (volume 27, numéro 2)

Prix du chercheur émérite :
Dr Jacques Brown

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Quelle a été votre première pensée lorsque vous avez appris que vous remportiez ce prix?

J’ai reçu la nouvelle sur ma messagerie vocale. J’étais en déplacement, et le bureau de la SCR n’a pu me joindre à temps pour m’en faire l’annonce officiellement. J’ai été très surpris et ravi puisque mon domaine de recherche est quelque peu en dehors des champs d’expertise habituels dans le domaine de la rhumatologie au Canada.

Pourquoi êtes-vous devenu rhumatologue? Quels sont les facteurs ou les personnes qui vous ont inspiré à entreprendre cette carrière?

Lorsque j’étais étudiant de première année en médecine interne à l’Université Laval, à Québec, j’étais attiré par deux sous-spécialités, la rhumatologie et la neurologie, qui offraient toutes deux à l’époque d’intéressantes possibilités de diagnostic, mais peu d’options de traitement. Finalement, j’ai choisi la rhumatologie, car j’ai eu un excellent stage au Service de rhumatologie du Centre hospitalier de l’Université Laval (CHUL) dirigé par le Dr Lucien Latulippe. J’ai été particulièrement impressionné par la passion du Dr Gilles Mathon et la sagesse du Dr Jean-Yves Lang. De concert avec la Dre Monique Camerlain de Sherbrooke, ils m’ont convaincu que la rhumatologie était une sous-spécialité qui portait une grande attention aux besoins des patients. Les Drs André Lussier et Henri Ménard ont stimulé mon intérêt pour la recherche lorsque j’ai suivi ma formation en rhumatologie à l’Université de Sherbrooke. En tant que chargé de recherche de La Société de l’arthrite, le Dr Lussier m’a servi de mentor tout au long de ma formation postdoctorale de deux ans sur les maladies métaboliques des os à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) de Lyon, en France.

Selon vous, quelles sont les qualités d’un chercheur émérite?

D’abord, vous devez être passionné par ce que vous faites afin d'y trouver de l'agrément et de vouloir vous y consacrer longtemps. En tant que médecin, nos sujets de recherche sont inspirés de besoins cliniques non comblés. Il faut croire fermement que si vous ne vous penchez pas sur le problème, il se peut que personne d'autre ne le fasse. Les collaborateurs sont essentiels à la réussite puisque même le plus talentueux des chercheurs ne possède pas toute l’expertise requise. Enfin, l’amélioration des soins offerts aux patients devrait toujours être au cœur de nos activités de recherche.

Vous avez constitué le Groupe de recherche en rhumatologie et maladies osseuses qui est devenu le catalyseur d’un programme de recherche fécond combinant des activités de recherche novatrices en laboratoire, des essais cliniques et d’importantes études de cohortes. Vous êtes aussi cochercheur principal dans l’Étude canadienne multicentrique sur l’ostéoporose (CaMos). Quelles avancées importantes votre recherche vous a-t-elle permis de réaliser?

La plus importante a été la découverte, en 2001, du premier et du seul gène connu à ce jour associé à la maladie osseuse de Paget sur le chromosome 5q35-tel (mutation récurrente du gène qui code le séquestosome-1 [SQSTM1/p62]). Les coûts faramineux associés à la caractérisation phénotypique de près d’un millier de sujets ont été couverts en réinvestissant les fonds obtenus grâce aux subventions de recherche clinique octroyées par l’industrie pharmaceutique. Cette découverte nous a permis de recruter une jeune chercheuse, la Dre Laëtitia Michou, qui est maintenant à la tête de notre programme de recherche sur la génétique de la maladie osseuse de Paget et sur de rares maladies génétiques des os.

Je suis très fier de notre étude de cohorte épidémiologique CaMos et du programme Reconnaître l’ostéoporose et ses conséquences au Québec (ROCQ), qui a permis de ramener un jeune chercheur estimé dans notre unité, le Dr Louis Bessette. Les deux études ont fourni des données épidémiologiques uniques sur l’ostéoporose, puisqu’elles ont permis de définir les fractures de fragilisation, les fractures vertébrales cliniquement importantes, la morbidité et la mortalité de même que les coûts associés à cette maladie débilitante.

Tout cela a été rendu possible grâce au travail acharné et dévoué de notre talentueux personnel infirmier en recherche clinique, de notre gestionnaire et de notre adjointe administrative qui ont géré la complexité grandissante des procédures de fonctionnement usuelles en matière de recherche clinique.

Y a-t-il d’autres domaines d’intérêt que vous voudriez approfondir un jour? Quels projets entreprendrez-vous dans un avenir proche?

Au cours des dernières années, j’ai effectué de la recherche sur les causes des fractures atypiques du fémur (FAF), un effet indésirable très rare, mais grave qui survient chez les patients recevant des bisphosphonates pendant une longue période pour traiter l’ostéoporose. Il s’agit de fractures « par insuffisance » ou « de fatigue » associées à une altération des propriétés du tissu osseux. En parallèle, j’ai découvert une famille dont les adultes étaient sujets aux FAF spontanées. Nous étudions actuellement les facteurs génétiques en cause dans l’espoir de trouver des marqueurs génétiques qui pourraient être utilisés pour cibler les patients qui risquent de subir ce genre de fractures lorsqu’ils reçoivent des bisphosphonates.

Quelle est l'incidence de votre recherche sur les soins cliniques aux patients? Que pouvez-vous transposer du laboratoire de recherche à la salle d’examen?

Le dépistage précoce de la maladie de Paget et du risque de FAF chez les patients améliorera grandement les soins cliniques. Notre recherche épidémiologique a contribué à approfondir nos connaissances quant aux processus pathologiques et à la prise en charge clinique de l’ostéoporose et des fractures qui y sont associées.

Quels sont les aspects les plus gratifiants de votre expérience dans le domaine de la rhumatologie et quels sont les aspects les plus difficiles?

Le plus satisfaisant est de contribuer à la formidable croissance de nos connaissances sur divers processus pathologiques rhumatismaux, de collaborer au développement de nombreuses nouvelles options thérapeutiques qui améliorent les soins aux patients et de recevoir la reconnaissance de nos patients en retour.

L’aspect le plus difficile a été de ne pas réussir, en quelque sorte, à faire progresser l’ostéoporose et les maladies métaboliques des os dans l’échelle des priorités des organismes de financement et des acteurs du secteur de la santé.

Si vous vous retrouviez sur une île déserte, quel livre aimeriez-vous avoir?

La Bible, puisque je suis catholique pratiquant. J’aimerais également relire Le parrain, de Mario Puzo, qui illustre les conséquences délétères de l’expression « la fin justifie les moyens », une chose qu’il faut toujours garder en tête lorsque l’on mène une carrière brillante dans un milieu très concurrentiel!

On vous offre un billet d’avion pour la destination de votre choix. Quelle serait-elle?

J’irais en Écosse avec ma famille pour visiter la terre natale de nos ancêtres.

Quel conseil donneriez-vous à une personne qui souhaite mener une carrière de rhumatologue universitaire?

Il n'est pas essentiel de mener une carrière universitaire pour exceller dans la pratique de la rhumatologie, mais si vous êtes passionné et travaillez dur, il s’agit du parcours le plus facile pour parvenir à l’excellence.

Envisagez-vous la retraite? Que feriez-vous si vous n’étiez pas rhumatologue?

Je songe à prendre ma retraite d'ici cinq ans. J’aurais adoré être pilote d’avion.


Jacques Brown, M.D., FRCPC
Professeur de clinique, Département de médecine, Université Laval
Rhumatologue, CHU de Québec-Université Laval
Ville de Québec (Québec)

Le Dr Jacques Brown recevant son prix des mains des Dres Joanne Homik et Laëtitia Michou.

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