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Été 2015 (volume 25, numéro 2)

Rhumatologue émérite 2015 :
le Dr Carter Thorne

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1. Pourquoi avez-vous choisi de devenir rhumatologue?

Mes six premiers mois comme interne en médecine ont inclus deux mois dans le service de rhumatologie de l’Hôpital Wellesley, où le Dr Metro Ogryzlo, ce « géant », était chef de service; il était également chef de la division de rhumatologie à l’Université de Toronto. Le Dr Ogryzlo était un homme exceptionnel : attentionné, empreint de compassion et capable de percevoir non seulement les arbres dans la forêt, mais aussi la forêt dans le paysage.

J’ai également été influencé par d’autres personnes remarquables qui en ont influencé bien d’autres aussi : le Dr Murray Urowitz, le Dr Hugh Smythe, la Dre Dafna Gladman et le Dr Peter Lee. J’ai de plus eu le privilège de rencontrer et d’apprendre à connaître M. Edward Dunlop.

Une autre grande influence est venue des patients... la chasse était lancée; je voulais faire partie de ce programme, de ce cheminement...

2. Quels événements ou personnes vous ont influencé en cours de route?

• Pour le choix de la rhumatologie comme spécialisation : le Dr Ogryzlo.
• Pour apprendre comment observer et compter : la Dre Gladman, le Dr Smythe et le Dr Urowitz.
• Pour ce que j’ai appris sur les enfants atteints d’arthrite : le Dr Abraham Shore.
• Pour ce que j’ai appris sur les équipes et l’importance de l’éducation des patients : le personnel paramédical de Wellesley RDU, surtout Ros, et les deux années consécutives que j’ai passées avec eux.
• Pour le soutien et les encouragements en matière de recherche : la Dre Gladman, le Dr Edward Keystone, le Dr Inman, la Dre Bombardier, le Dr Boulos Haraoui et la Dre Pope.
• Pour mon engagement : le Dr Smythe, qui m’a nommé fellow en chef même si j’avais déclaré que je n’étais pas particulièrement attiré par la voie universitaire; le Dr Bill Vail, chirurgien généraliste de Newmarket qui était président de l’Association médicale de l’Ontario (AMO) à mon arrivée au sein de l’AMO comme représentant de l'Association professionnelle des internes et résidents de l'Ontario (PAIRO), pour m’avoir parlé de Newmarket et m’avoir encouragé à y soumettre ma candidature; et le Dr Paul Davis, qui a eu la vision de changer le format et la direction de la SCR et qui s’est fait le champion de l’inclusion de membres communautaires dans le comité exécutif de cette nouvelle SCR.
• Pour ses judicieux conseils et son soutien : M. Denis Morrice.
• Mes collègues qui étaient toujours là pour m’aider quand j’avais une nouvelle idée. Mes patients pour leur patience.
• Ma femme, Jena, et nos enfants, Sarah et Daniel, qui ont survécu à mes longues heures de pratique, mes interminables réunions et mes absences imprévues.

3. Quelles sont d’après vous les qualités d’un rhumatologue émérite?

• Il est respecté par ses pairs.
• Il contribue à la communauté de rhumatologie en participant à l’éducation, à l’organisation professionnelle, à la recherche, à la défense des intérêts et aux soins aux patients.
• Il est une personne ressource pour les soins, l’éducation et le partage.

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Le Dr Thorne, ayant tout à fait l’air du rhumatologue émérite.
Crédit photo : Dr Fred Doris, 2015.


4. Vous avez tenu des rôles de direction au sein de la SCR, de l'Association de rhumatologie de l'Ontario (ARO), de la Ligue panaméricaine des associations de rhumatologie (PANLAR) et comme membre du conseil régional de la santé de la région de York. Selon vous, comment vos efforts au sein de ces organismes ont-ils aidé à donner forme au domaine de la rhumatologie en Ontario?

Ceux qui souhaitent apporter des changements significatifs doivent regarder au-delà de leur environnement immédiat pour apprécier ce qui peut véritablement être réalisé. Travailler avec différents groupes, inter-reliés en tant que planificateurs, payeurs et fournisseurs de soins de santé, permet d’envisager et d’apprécier plus facilement les occasions de convergence, d’intégration et de vision à long terme. Les cliniciens sont bien placés pour considérer ce dernier point puisque nous sommes les seuls de ceux nommés précédemment qui verront les fruits de ces efforts.
Les concepts de traitement jusqu’aux valeurs cibles, de modèles de soins et d’évaluation musculosquelettique systématique reflètent les principes qui ont fourni un cadre de travail et une plateforme pour promouvoir les meilleures pratiques afin d’assurer les meilleurs résultats.

5. Qu’aimez-vous le plus du fait de vivre en Ontario?

Le passage des saisons, la gamme de paysages (chalet), les possibilités, la multiethnicité, le partage des valeurs et les nouveaux concepts.

6. Compte tenu de l’étendue de vos travaux dans le domaine des maladies rhumatismales, quelle direction anticipez-vous pour la recherche clinique d’ici la prochaine décennie?

L’époque des essais comparatifs randomisés (ECR) est révolue, non pas pour le développement de médicaments, mais comme source de connaissances des meilleures pratiques. Le développement de cohortes cliniques comme la Canadian Early Arthritis Cohort (CATCH), l’Ontario Biologics Research Initiative (OBRI), le Consortium canadien de recherche sur la spondylarthrite (SPARCC) et le Groupe de recherche canadien sur la sclérodermie (GRCS) vont nous fournir de précieuses indications sur ce qui pourrait faire une différence au niveau des soins cliniques et des résultats. Cependant, la prochaine étape sera le développement et la maturation d’essais pratiques robustes utilisant ces cohortes et ces investigateurs pour diriger nos soins vers des notions d’observance améliorée, d’engagement du patient et d’amélioration continue.

7. Si vous pouviez vivre à toute autre période de l’histoire, quelle époque choisiriez-vous?

Nous sommes en plein dans la meilleure époque pour notre profession!

8. Quel est le plus grand défi professionnel et organisationnel auquel vous avez été confronté et comment l’avez-vous surmonté?

Sur le plan professionnel, ce serait le maintien du concept et de l’intégrité du TAP (The Arthritis Program) au centre régional de la santé de Southlake, à Newmarket. Malgré ses succès et les éloges reçus (de patients, d’administrateurs, d’organismes d'accréditation, d’universités, du ministère de la Santé et de pairs), nous faisons toujours face à des défis, notamment le manque de reconnaissance pour les soins interprofessionnels, non pas comme un ajout ou un « extra », mais comme élément essentiel aux succès des résultats de nos patients.

Sur le plan organisationnel, amener la SCR à envisager un nouveau modèle de commandite pour assurer la transparence et la durabilité de l’organisation et une évolution vers un nouveau cadre d’administration et de gouvernance. Cette responsabilité a été très habilement prise en charge par le Dr Cory Baillie.

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Le Dr Carter Thorne reçoit son prix du rhumatologue émérite du Dr Baillie.
Crédit photo : SCR, 2015.


9. Quelle empreinte durable croyez-vous que vous aurez léguée à la communauté de la rhumatologie?

L’atténuation de l’écart entre la communauté universitaire et le grand public pour donner une voix à ceux qui travaillent aux premières lignes. Je suis très attentif au rôle de bons soins cliniques en plus de l’utilisation judicieuse et optimale de médicaments pouvant assurer les meilleurs résultats. Et enfin, la valeur que j’accorde au modèle de soins interprofessionnels pour le mieux-être de nos patients.

10. Je n’avais jamais anticipé que ma décision de me tourner vers la rhumatologie serait une telle bénédiction... jusqu’à ce que cela se produise. Cette décision a donné lieu à beaucoup de succès sur le plan de la formation d’équipes, de la recherche, de la défense des intérêts et de la croissance professionnelle .

11. De quels changements au paysage de la rhumatologie avez-vous été témoin au cours de votre carrière?

L’évolution des ECR comme arbitres des soins et pratiques au rôle de cohortes cliniques, reflétant davantage nos patients et notre pratique, pour nous guider vers les meilleures pratiques.

12. Comment croyez-vous que le paysage changera d’ici votre retraite?

Plus de cliniciens accepteront qu’ils peuvent combiner recherche et pratique clinique tout en améliorant leur pratique.

Possiblement le concept du regroupement des soins en rhumatologie, comme cela a été fait dans une certaine mesure avec les soins en oncologie, sous-entendant une responsabilité pour l’enveloppe des coûts associés dans la portée de notre pratique.

13. En 2013, la médaille du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II vous a été décernée; que représentait cet honneur pour vous?

J’ai été proposé pour cette reconnaissance par Janet Yale, de La Société de l’arthrite. Cela représentait deux succès distincts, mais reliés : le premier, sur le plan organisationnel, reflétant le rapprochement renouvelé et l’engagement de la SCR et de La Société de l’arthrite à œuvrer selon nos forces vers l’atteinte de nos objectifs communs et le second, la reconnaissance d’une membre respectée de la communauté de l’arthrite qui n’était pas ma collègue professionnelle.

14. Si vous pouviez inventer un gadget, qu’est-ce que ce serait et pourquoi en avons-nous besoin?

Un téléporteur : pour ne plus perdre du temps en déplacements!

15. Vous êtes reconnu pour votre capacité à mobiliser la communauté de la rhumatologie en réponse à des crises sortant de nulle part, comme le retrait de la suspension de naproxène, les problèmes liés au suivi ophtalmologique pour le traitement antipaludique et les avertissements de Santé Canada à propos des interactions médicamenteuses avec le méthotrexate. Comment avez-vous réussi à faire bouger les choses dans ces dossiers?

En identifiant les points leviers, les parties responsables et les décideurs. Le besoin doit être réel et facile à identifier. Il est aussi utile de s’assurer qu’il y a une « justice naturelle » au projet et que toute personne de la communauté générale puisse reconnaître le mérite de l’exercice. Je m'en voudrais de ne pas souligner le rôle important de M. Morrice dans nos succès. Il a travaillé inlassablement au nom des patients et de nos membres; il a gardé la porte entrouverte pendant que nous, médecins, devions voir à nos obligations professionnelles et il nous a ramené sur le droit chemin chaque fois qu’il nous voyait dévier de notre argument.

16. On vous offre un billet d’avion pour la destination de votre choix. Où allez-vous?

Mon chalet : confortable, familier, empreint de souvenirs, et je peux le partager avec ma famille et mes amis.

17. Quels sont les défis que vous voyez venir pour les rhumatologues canadiens dans le futur et que peuvent faire les rhumatologues individuels et la SCR pour relever ces défis?

Les contraintes fiscales continues vont limiter notre accès aux nouveaux agents thérapeutiques. En tant qu’individus et en tant que communauté, nous devons donc nous engager à utiliser nos ressources avec prudence, à engager nos patients, à partager nos responsabilités thérapeutiques (avec les professionnels paramédicaux) et à mesurer et partager notre expérience et notre savoir.

18. Quel a été votre premier emploi rémunéré?

Camelot pour le Toronto Star, de 10 à 13 ans. J’ai utilisé l’argent que j’avais ramassé pour acheter la bague de fiançailles de ma femme (elle n’était pas énorme!).

Carter Thorne, M.D., FRCPC, FACP
Ancien président,
Société canadienne de rhumatologie
Directeur médical,
The Arthritis Program et chef de la division de rhumatologie,
Centre régional de la santé de Southlake
Newmarket, Ontario

 

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